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Priorités de l'AMF dans le cadre de la revue d'EMIR

Alors que la Commission européenne a entrepris en novembre 2016 un travail de revue du règlement EMIR sur les produits dérivés négociés de gré à gré, l'AMF publie deux papiers de position sur ses priorités dans le cadre de la révision d'EMIR et sur les conditions dans lesquelles les infrastructures de post-marché installées hors de l'Union européenne peuvent bénéficier du régime d'équivalence.

Le 23 novembre 2016, la Commission européenne a publié un rapport sur la revue du règlement EMIR sur les dérivés négociés de gré à gré, adopté en 2012. Il s’inscrit dans le prolongement de la consultation initiée par la Commission en mai 2015 sur la révision d’EMIR, à laquelle l’AMF avait répondu. Un projet de modification du règlement devrait être publié prochainement.

Pour l’AMF, la mise en œuvre d’EMIR a fait émerger le besoin de plus de proportionnalité et de cohérence. La finalisation par les autres places financières internationales de leur réglementation sur dérivés a aussi permis de mettre en lumière la possibilité pour les acteurs de réaliser des arbitrages réglementaires, pouvant renforcer ce besoin de proportionnalité. Par ailleurs, ces réflexions doivent être mises en perspective avec les tendances actuelles de marchés qui placent de plus en plus  les infrastructures de marché en concurrence les unes avec les autres. Ces sujets prennent une acuité particulière à l’aune du Brexit en raison des enjeux liés aux infrastructures de marché actuellement localisées au Royaume-Uni. L’ensemble de ces considérations rend indispensable la revue du régime prévu par EMIR pour les activités réalisées depuis ou avec des pays tiers.

Dans ce cadre, l’AMF souhaite souligner les priorités qui lui semblent essentielles de traiter dans le cadre de la revue d’EMIR :

L’AMF souscrit à l’objectif de renforcer la proportionnalité des obligations prévues par le texte

L’obligation de déclarer les dérivés à des registres centraux de données doit être rationnalisée

L’obligation de déclarer les dérivés aux registres centraux de données (Trades Repositories), a pu générer des doublons, des complexités opérationnelles et juridiques, voire, à certains égards, une inflation de données : si l’AMF reste attachée au principe d’une déclaration par les deux parties au contrat elle défend le besoin de proportionnalité qui pourrait se décliner par les mesures suivantes : 

  • une suppression, dans le cadre d’EMIR, de l’obligation de déclaration des transactions sur dérivés listés, à l’exception des positions sur dérivés de matière première, pour lesquelles l’accès à des informations sur le bénéficiaire final présente des intérêts indéniables pour l’exercice de ces missions de surveillance par l’AMF ;
  • un passage d’un système actuel de double déclaration à un système simplifié reposant sur la déclaration d’une seule des deux contreparties, lorsqu’un contrat est conclu entre une contrepartie financière et une contrepartie non financière qui ne dépasse pas les seuils de compensation ou un gérant d’OPCVM ou de FIA qui intervient marginalement sur dérivés ;
  • une suppression de l’obligation de déclaration des transactions intra-groupe entre contreparties non financières dont les positions n’excèdent pas les seuils de compensation.

Les petites contreparties financières doivent être exemptées de l’obligation de compensation

L’AMF soutient le principe d’une exemption de l’obligation de compensation pour les transactions conclues par les contreparties financières qui n’utilisent qu’occasionnellement des dérivés, compte tenu du faible risque représenté par ces entités et de la charge représentée par la compensation obligatoire.

L’AMF considère que la revue d’EMIR doit être l’occasion de repenser les relations de l’Europe avec les pays tiers

Pour l’AMF en effet, la revue d’EMIR ne doit pas être purement technique.

Le règlement EMIR, comme d’autres textes européens (MIFID/MIFIR, notamment), prévoit un principe d’équivalence qui permet à un établissement localisé dans un Etat hors de l’Union européenne (pays tiers) de proposer ses services dans l’Union, en se conformant à la législation applicable sur son territoire  et en étant exclusivement supervisé par son régulateur local Ce dispositif présente des limites par ailleurs révélées à l’occasion de la mise en œuvre pratique du principe d’équivalence pour les chambres de compensation de pays tiers. L’AMF considère que ce dispositif doit être revu et formule, à cette fin, des recommandations.

Ces recommandations visent à rationaliser le processus d’examen de l’équivalence des réglementations, en précisant les critères à prendre en compte par la Commission dans l’évaluation initiale et en renforçant le dispositif de suivi d’équivalence dans le temps. L’AMF propose, par ailleurs, de renforcer le rôle de l'Esma dans ce dispositif. Dans tous les cas, la réciprocité doit être une condition sine qua non de l’équivalence. L’importance de l’activité dans l’Union des infrastructures devrait être prise en compte dans l’évaluation de l’équivalence, pour distinguer en particulier :

  • les infrastructures d’importance critique proposant leurs services sur des produits libellés en euros dont le poids est tel qu’elles font peser un risque systémique dans l’UE et pour lesquelles le régime d’équivalence ne devrait pas s’appliquer, car ces infrastructures devraient obligatoirement être localisées en Europe ; à défaut, les positions les plus significatives des adhérents compensateurs et des clients européens, seraient compensées dans des CCP qui, à l'avenir, ne seraient pas supervisées dans l'Union européenne. Ces facteurs d'extranéité peuvent être sources d'inquiétudes au quotidien pour les superviseurs et exacerbés en cas de crise si un appel à la liquidité de la BCE s'avérait nécessaire ;
  • les infrastructures d’importance significative, qui devraient faire l’objet d’une équivalence stricte des réglementations et d’une supervision par l’ESMA ; 
  • les infrastructures de moindre importance, pour lesquelles le principe d’équivalence global devrait perdurer.

L’AMF prêtera une attention particulière au client clearing

La perspective de la mise en œuvre de l’obligation de compensation centrale a fait ressortir un certain nombre de frottements entre les régulations : en particulier, les règles prévues par la directive OPCVM ont été davantage conçues pour des relations OTC bilatérales et ne prennent pas nécessairement en compte les spécificités de la compensation centrale. Ainsi, par exemple, la limitation du risque de contrepartie des OPCVM concluant des contrats dérivés de gré à gré à 5% ou 10% pour des raisons de diversification des risques doit être repensée compte tenu de l’obligation de compensation, en tenant compte le cas échéant du niveau de ségrégation retenu par les clients.

De la même façon, les contraintes actuelles des OPCVM en matière de réutilisation du collatéral reçu sous forme de titres doivent être revues à l’aune de l’obligation de compensation centrale.

La qualification des organismes de titrisation doit être améliorée : si les organismes de titrisation se voient aujourd’hui dispensés de compensation centrale du fait de leur qualification de contrepartie non financière, seuls les véhicules STS méritent réellement une telle dispense.

Enfin, la perspective de l’obligation de compensation centrale pour les dérivés négociés de gré à gré, complètement inédite pour les clients, a également suscité des difficultés d’interprétation sur le rôle exact et les responsabilités de l’adhérent compensateur vis à vis des clients. L’AMF considère que les obligations des adhérents compensateurs doivent être clarifiées et renforcées au niveau européen.