- Accueil
- Le médiateur
- Journal de bord du médiateur
- Dossiers du mois
- OPCVM : quand la surperformance du fonds entraine une hausse significative des frais
OPCVM : quand la surperformance du fonds entraine une hausse significative des frais
Les frais liés aux organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM) suscitent fréquemment des interrogations de la part des investisseurs, qui ne sont pas toujours pleinement conscients, au moment de la souscription, des frais potentiels associés à leur investissement.
Compte tenu de la diversité des frais existants, il est crucial de comprendre, avant d'acquérir les parts d'un OPCVM ou d’un FIA (fonds d’investissement alternatif), les coûts et frais qui peuvent être supportés, ces derniers étant susceptibles d’avoir un impact significatif sur la rentabilité du placement.
Le dossier que je vous présente ce mois-ci illustre très concrètement comment la performance d'un fonds peut avoir une incidence sur les frais facturés.
Les faits
Monsieur W. m'a fait savoir qu'il avait investi dans un OPCVM en 2011, et qu'en consultant ses relevés annuels de frais, il a été surpris de constater que le coût associé à cet investissement était plus de trois fois supérieur en 2020, par rapport à 2019, en passant au total de 606,95 à 1 942,11 euros.
Afin d'obtenir des détails et une justification de ce montant, Monsieur W. a sollicité sa banque à plusieurs reprises, sans toutefois parvenir à une réponse satisfaisante.
En conséquence, Monsieur W. a procédé au transfert de son compte vers un nouveau teneur de compte pour se prémunir d’une nouvelle augmentation de frais.
C’est dans ce contexte que Monsieur W. m’a saisie dans le but d’obtenir le remboursement du montant facturé pour l’année 2020 ou à défaut, pour avoir des réponses claires sur la justification des frais.
L’instruction
J’ai interrogé l’ancien teneur de compte de Monsieur W. qui m’a indiqué que les frais « indirects » sur l’OPCVM souscrit par Monsieur W. avaient en effet augmenté entre 2019 et 2020.
Plus précisément, le teneur de compte m’a informée que la société de gestion avait facturé une commission de surperformance pour l’année 2020, expliquant ainsi l’augmentation de la ligne des « coûts et frais indirects liés aux instruments financiers » apparaissant sur le relevé de frais annuel communiqué au client (conformément à l’article 325-14 du règlement général de l'Autorité des marchés financiers).
La banque a rappelé que cette commission a été appliquée conformément au document d’information clé (DIC) et au prospectus du fonds, et rentrait dans le cadre de l’article 321-118 du règlement général de l’Autorité des marchés financiers.
La recommandation
Après une analyse approfondie de la réglementation applicable, j’ai rappelé à Monsieur W. que la terminologie « coûts et frais indirects liés aux instruments financiers » englobe la « commission de surperformance » qui est une commission liée aux résultats, prélevée en cas de dépassement de l’objectif de performance fixé, lequel est précisé dans le DIC.
S’agissant de l’OPCVM sur lequel Monsieur W. a investi, il m’est apparu que le fonds a marqué une surperformance de 28 % par rapport à son indice de référence en 2020 (alors que cette surperformance n’était que de 6 % en 2019) et a sous-performé toutes les années suivantes.
Pour 2020, la performance du fonds ayant été supérieure à son indice de référence, une commission de 20 % de surperformance a été prélevée par la société de gestion de l’OPCVM, expliquant l’augmentation des frais.
J’ai relevé que cette commission était bien mentionnée dans le DIC et dans le prospectus de l’OPCVM, sans pour autant qu’elle ne soit précisément quantifiée dans ces documents, dès lors qu’elle est susceptible de varier chaque année et qu’elle ne peut donc faire l’objet que d’une estimation. Il est important de noter que les informations ex ante, c’est-à-dire celles fournies en amont aux clients, ne peuvent être qu'une simulation des coûts. A l'inverse, les relevés périodiques – adressés une fois les opérations réalisées (information qualifiée "ex post ") – doivent se baser sur les coûts réels.
En outre, dans ce dossier, j’ai observé que l’établissement avait bien respecté ses obligations d’information "ex post", puisque des relevés de frais annuels ont bien été remis chaque année au client pour l’informer des coûts et frais réellement supportés sur l’année passée.
En dernier lieu, j’ai attiré l’attention de Monsieur W. sur le fait que la commission de surperformance est prélevée directement par la société de gestion sur la valeur liquidative, et non par le teneur de compte lui-même. Par conséquent, si la commission de surperformance a une influence directe sur le rendement de l’investissement, elle n’en reste pas moins indépendante de la banque qui n’en détermine pas elle-même le montant. La commission de surperformance s’appliquera donc, si la condition de surperformance est à nouveau remplie à l’avenir, chez le nouveau teneur de compte de Monsieur W tant qu’il détiendra ses parts.
La leçon à tirer
Conformément aux exigences de la directive MIF 2 et le cas échéant du règlement PRIIPs (Packaged Retail Investment and Insurance-based Products), les teneurs de compte doivent régulièrement fournir à leurs clients, potentiels ou actuels, des informations détaillées sur les coûts et frais qui leur sont ou seront facturés. Ces informations sont cruciales pour permettre aux clients de prendre des décisions éclairées. Une difficulté réside toutefois dans la lisibilité et la compréhensibilité des frais mentionnés lors de la souscription d'instruments financiers, puisque la nomenclature des frais varie entre les différents acteurs.
Ce dossier rappelle la nécessité pour les investisseurs de comprendre pleinement les frais associés aux OPCVM avant de s'engager dans de tels placements. Pour cela, il est indispensable de prêter une attention particulière aux termes du document d'information clé (DIC) et du prospectus de l'OPCVM afin de saisir les différentes composantes des frais, y compris les éventuelles commissions de surperformance, dont le montant est variable. L’existence d’une commission de surperformance peut faire varier significativement le montant des frais supportés d'une année à l'autre, en fonction des performances du fonds, ce qui peut avoir un impact considérable sur le coût total supporté par l’investisseur.
De plus, il est important de souligner que certains frais dits indirects, tels que les commissions de surperformance, sont prélevés directement par la société de gestion et sont indépendants du teneur de compte.
De façon plus générale, l’AMF a entendu reprendre les orientations de l’ESMA dans une nouvelle position DOC-2021-01. Ces orientations ont pour objectif de promouvoir une convergence et une normalisation accrues dans le domaine des commissions de surperformance et d’encourager une surveillance convergente par les autorités compétentes.
Plus particulièrement, en cas de performance inférieure à l’indice de référence une année donnée sur un OPCVM, il existe désormais un dispositif qui conduit la société de gestion, dans les 5 années qui suivent, à ne prélever à nouveau une commission de surperformance qu’après avoir d’abord rattrapé cette sous-performance.
Sur le même thème
Responsable de la publication : Le Directeur de la Direction de la communication de l'AMF. Contact : Direction de la communication, Autorité des marchés financiers - 17, place de la Bourse - 75082 Paris Cedex 02