Merci de désactiver le bloqueurs de pub pour visualiser cette vidéo.
Toutes les informations communiquées par un conseiller à un épargnant doivent être exactes, claires et non trompeuses

Toutes les informations communiquées par un conseiller à un épargnant doivent être exactes, claires et non trompeuses

Les épargnants peuvent solliciter un conseil en investissements financiers auprès d’un professionnel habilité afin d’être guidés dans leurs choix de placements, en fonction de leurs objectifs et de leur profil d’investisseur. L’information communiquée à l’épargnant en matière de placement peut malheureusement présenter un caractère erroné. Dans ce cas, l’épargnant peut s’estimer victime d’un manquement, de la part du professionnel, à son obligation d’information, et vouloir mettre en cause sa responsabilité civile.

Ce dossier permet à la fois d’attirer l’attention des professionnels sur le périmètre de cette obligation d’information et celle des épargnants sur la notion de partage de responsabilité.

Les faits

Monsieur S a sollicité son conseiller en février 2021 pour acquérir de nouvelles parts de SCPI. Le conseiller a alors proposé à Monsieur S la SCPI X, qui devait lui permettre de diversifier ses actifs immobiliers pour un taux de distribution équivalent à celui des autres SCPI auxquelles il était déjà associé, taux qui figurait sur un document interne présenté spécifiquement au client lors de la souscription.

Sur la base de cette information, Monsieur S a souscrit des parts de la SCPI X.

Or, il s’est aperçu, postérieurement à la souscription, que le bulletin d’information trimestriel de cette SCPI mentionnait pour l’année 2020 un rendement inférieur à celui précisé par le conseiller.

Monsieur S estimait que son conseiller avait manqué à son devoir d’information et qu’il se serait abstenu de souscrire ces parts si la performance réelle sur l’année écoulée lui avait été communiquée préalablement à la souscription. C’est dans ces conditions que Monsieur S a sollicité mon intervention.

L’instruction

Dans le cadre de l’instruction de ce dossier, je me suis rapprochée de l’établissement mis en cause pour recueillir ses observations.

Dans un premier temps, l’établissement a refusé de faire droit à la demande de Monsieur S au motif qu’il n’était pas contesté que ce dernier avait reçu la documentation règlementaire parmi laquelle figurait le dernier bulletin trimestriel d’information qui indiquait le taux exact de distribution de la SCPI s’agissant de l’exercice clos de 2020.

S’agissant du taux de distribution erroné communiqué par le conseiller à son client, l’établissement mis en cause m’a indiqué que cette donnée erronée provenait d’une information interne affichée dans son outil professionnel, anomalie corrigée par la suite. L’établissement a ajouté que cette information interne n’avait pas vocation à être diffusée et que seule la documentation règlementaire, qui ne présentait aucune erreur, devait être prise en considération pour une décision d’investissement en connaissance de cause.

La recommandation

J’ai alors fait part au professionnel de mon analyse différente de la lecture des textes.

En effet, en vertu du 8° de l’article L541-8-1 du code monétaire et financier, le professionnel doit « veiller à ce que toutes les informations, y compris les communications à caractère promotionnel, adressées à leurs clients, notamment leurs clients potentiels, présentent un contenu exact, clair et non trompeur ». Cet article n’opère pas de distinction selon l’origine de l’information. Monsieur S s’étant trouvé en possession de l’information erronée, quand bien même elle provenait de l’outil interne informatique du conseiller, j’ai considéré qu’il s’agissait bien d’une information adressée au client au sens de l’article cité ci-dessus, d’autant plus qu’il s’agissait du critère principal de choix de son investissement.

L’information communiquée spécifiquement par le conseiller étant non conforme à celle présentée sur la documentation règlementaire relative à la SCPI, je ne pouvais pas considérer qu’elle présentait un contenu exact, clair et non trompeur. En conséquence, le mode d’indemnisation devait se fonder selon moi sur la perte de chance de ne pas avoir pu souscrire sur la base d’une information complète.

L’établissement mis en cause a finalement accepté de revenir sur sa position et d’indemniser Monsieur S, en cas de rachat des parts de SCPI objets du litige, comme je le lui avait proposé, à hauteur du différentiel entre le prix de souscription et la valeur de rachat, ce qui correspondait aux deux tiers du préjudice financier que Monsieur S estimait avoir subi.

J’ai donc émis une proposition de solution sur cette base auprès de Monsieur S en lui laissant 30 jours afin qu’il me fasse part de son refus ou acceptation.

Toutefois, Monsieur S m’a demandé pourquoi l’indemnisation proposée ne couvrait pas l’entièreté du différentiel, notamment le différentiel entre les performances distribuées par la SCPI X et les autres SCPI dont il était déjà associé. A cette question, j’ai répondu qu’outre le fait qu’une indemnisation du préjudice de perte de chance ne peut jamais être égale à 100% de l’avantage espéré, il m’était apparu qu’il fallait prendre en compte le fait qu’il avait reconnu avoir reçu le document d’informations clés (DIC PRIIPs), la note d’information, les statuts de la SCPI ainsi que le dernier rapport annuel et le dernier bulletin trimestriel d’information, documents qui ne reprenaient pas l’information erronée communiquée par le conseiller. Pour cette raison, j’ai considéré qu’il était juste, en l’espèce, d’opérer ce partage de responsabilité un tiers/deux tiers. A la lumière de ces explications, Monsieur S a alors accepté la proposition de solution.

La leçon à tirer

S’agissant des professionnels, je rappelle que l’information délivrée au client doit être appréhendée dans sa globalité et que toutes les informations qui lui sont adressées doivent avoir un contenu exact, clair et non trompeur. Ainsi, lorsque des informations contradictoires sont adressées au client, il n’est pas possible de considérer qu’elles remplissent ces conditions, quand bien même les derniers bulletins d’information et rapport annuel contiendraient l’information juste. La délivrance de cette documentation au client ne dispense donc pas le conseiller de respecter l’article L541-8-1 du code monétaire et financier qui pose l’exigence d’un contenu clair, exact et non trompeur.

S’agissant des épargnants, je rappelle qu’en cas de manquement au devoir d’information, et plus particulièrement dans le cas de la communication d’une information erronée, il faut vérifier si le professionnel a délivré par ailleurs la documentation réglementaire qu’il était tenu de leur communiquer. Dans l’affirmative, en cas d’informations contradictoires entre l’information règlementaire et celle fournie par le conseiller, il convient, à mon sens, d’opérer un partage de responsabilité. J’attire donc leur attention sur la nécessité d’une lecture minutieuse de cette documentation remise.

Par ailleurs, avant de procéder à leurs choix d’investissements, les épargnants doivent être conscients qu’en aucun cas les performances passées ne préjugent des performances futures et qu’il est possible que des performances attractives ne se renouvellent pas à l’identique.