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Une étrangeté du Plan d'épargne retraite collectif : qu'en est-il du déblocage anticipé pour la remise en l'état de la résidence principale à la suite d'une catastrophe naturelle ?
Avec l’entrée en vigueur de la loi Pacte en 2019 sont apparus de nouveaux litiges résultant notamment de différences entre anciens et nouveaux dispositifs. Ainsi, alors que le déblocage anticipé pour remise en l'état de la résidence principale à la suite d'une catastrophe naturelle était un motif prévu pour le PERCO, celui-ci ne l'est plus pour le nouveau PER Collectif. Interpellée par ce constat, j'ai obtenu qu'une solution puisse être trouvée en équité et ainsi accompagner les salariés faisant face aux conséquences de plus en plus fréquentes du changement climatique et des catastrophes naturelles susceptibles d'en découler.
Les faits
Mme D. indiquait être titulaire d'un PERCO qui avait été transformé en PER Collectif (PERCOL, également appelé PERECO)[1] par son employeur avec l’accord des organisations syndicales et conformément aux dispositions de la loi PACTE du 22 mai 2019.
Ainsi, comme tous les salariés de l'entreprise, l’ensemble de ses avoirs avaient été transférés depuis son PERCO vers son PERCOL.
Mme D. faisait valoir avoir subi des dommages sur sa résidence principale liés à une sécheresse, catastrophe naturelle reconnue par arrêté ministériel qu'elle avait transmis à l'établissement X auprès duquel était ouvert son PERCOL.
Cependant, l'établissement X n'a pas fait droit à sa demande au motif que seuls les avoirs détenus dans un PERCO sont éligibles à un tel cas de déblocage, contrairement à un PERCOL.
En conséquence, Mme D. a formulé une réclamation afin de réitérer sa demande de déblocage. Toutefois, l’établissement X a maintenu son refus.
Perturbée par la situation, Mme D. estimait subir, outre le choc psychologique, un préjudice financier de l'ordre de 13 000 euros correspondant au montant du déblocage demandé et sollicitait mon intervention à cet effet.
L'instruction
J’ai contacté l'établissement X qui m’a confirmé que Mme D. avait effectivement soumis une demande de rachat anticipé pour le motif HA « remise en l’état résidence principale » par courriel.
Il précisait avoir saisi le déblocage pour ce motif le jour même et procédé au règlement de la somme nette de 1 530 euros correspondant à ses avoirs détenus sur son PEE.
En revanche, comme cela avait été précisé à Mme D., le teneur de comptes m'a indiqué qu'il n'avait pas été en mesure de procéder au déblocage des sommes investies sur son PERCOL dès lors que le motif invoqué ne permettait pas le rachat anticipé de ses avoirs dans ce dispositif, conformément à l’application de la règlementation.
Par ailleurs, s'agissant de la transformation du dispositif PERCO en PERCOL sans son accord ainsi que s'en prévalait Mme D., l'établissement X m'a précisé que son employeur, avait signé un avenant à l’accord collectif du plan d’épargne pour la retraite transformant le dispositif plan d’épargne pour la retraite collectif (PERCO) en plan d’épargne retraite d’entreprise collectif (PERCOL).
En conséquence, l'établissement X m'a confirmé son refus de donner suite à la demande de Mme D.
La recommandation
A réception de cette réponse, j'ai examiné attentivement ce dossier ainsi que la réglementation applicable.
J'ai relevé que depuis la loi PACTE du 22 mai 2019, le Plan d’Epargne pour la retraite collectif (PERCO) peut être transformé en PER d’entreprise collectif (PERECO ou PERCOL).
En l’espèce, il ressortait des éléments de ce dossier que l'employeur de Mme D. avait usé de cette faculté en signant un avenant à l'accord collectif relatif au PERCO conclu avec les instances représentatives du personnel, lequel lui était opposable en sa qualité de salariée.
Par ailleurs, j'ai observé qu'il est tout à fait exact que la remise en l'état de la résidence principale à la suite d'une catastrophe naturelle, reconnue par arrêté ministériel, constitue un motif de déblocage anticipé du PERCO[2] mais pas du PERCOL.
Aussi, en droit, je ne pouvais reprocher au teneur de compte de Mme D. d'avoir refusé de procéder au déblocage de ses avoirs placés sur son PERCOL pour ce motif.
Toutefois, contrairement à un juge, il est du pouvoir du Médiateur de soumettre des propositions en pure équité lorsque l’application stricte de la loi lui paraît conduire à une situation particulièrement injuste.
Or, dans ce cas précis les circonstances tout à fait exceptionnelles de ce dossier m'ont paru relever de cette situation.
En effet, alors que le motif de déblocage en cause demeure possible pour le dispositif PERCO, il ne l’est pas pour le dispositif PERCOL depuis la loi Pacte. A mon sens, cette rédaction semble s’opposer à ce que souhaitaient les pouvoirs publics pour l’épargne retraite (à l’exception de l’acquisition de la résidence principale) de ne conserver que les cas subis et non ceux à l’initiative du salarié.
Or, cette situation - évidemment subie et non choisie - qui place les épargnants dans une détresse à la fois financière et psychologique, devrait, selon moi, ouvrir la voie à ce cas de déblocage pour le dispositif PERCOL.
Par conséquent, je me suis, à cet effet, rapprochée de la Direction Générale du Travail (DGT) qui m’a indiqué qu’elle partageait mon analyse et, dans l’attente d’une évolution de ce texte souhaitée également par ses soins, préconise, en équité, une autorisation de déblocage par anticipation pour ce motif spécifique.
Forte de cette réponse, j’ai alors demandé à l’établissement X de réexaminer sa position en équité, en d’autres termes, d’accepter une solution plus équilibrée à l’aune des circonstances propres à ce dossier.
L'établissement X m’a indiqué que ses services de traitement avaient procédé en équité au déblocage anticipé du PERCOL de Mme D. pour le motif "Remise en l'état de la résidence principale".
La leçon à tirer
A l'heure où à travers le monde les catastrophes naturelles se multiplient : incendies, inondations, cyclones, etc., les impacts économiques et matériels de ces phénomènes sont considérables et entrainent d’importants besoins de reconstruction.
Au regard de ces éléments, le motif de déblocage anticipé "remise en l'état de la résidence principale à la suite d'une catastrophe naturelle", prévu dès la création du PERCO en 2003, est donc majeur pour de nombreux salariés qui se trouvent de plus en plus souvent exposés à ces risques et confrontés à des travaux de grande ampleur face à la destruction ou à la dégradation de leur habitation.
En ma qualité de médiateur, j'appelle donc de mes vœux une modification des textes, également préconisée par la DGT, qui ouvre droit au déblocage du PER collectif dans cette hypothèse et que, dans l'attente de cette évolution, un déblocage exceptionnel en équité permette au salarié titulaire d'un tel plan de faire face aux conséquences matérielles et financières d'une catastrophe naturelle.
Focus sur le déblocage anticipé pour remise en l'état de la résidence principale à la suite d'une catastrophe naturelle reconnue par arrêté ministériel
Cas commun au PEE et au PERCO, ce motif de déblocage anticipé vise les travaux de la résidence principale suite à des dégâts survenus par une catastrophe naturelle reconnue par arrêté ministériel. Le Guide de l'épargne salariale précise que "les travaux de réparation doivent porter sur la structure même de la construction, notamment le gros œuvre et être indispensables pour préserver son intégrité".
La copie de l’arrêté préfectoral ou ministériel déclarant la zone où est située la résidence principale sinistrée pour catastrophe naturelle est primordial pour prétendre au déblocage.
A cela s'ajoutent la copie de la déclaration de sinistre faite auprès de la compagnie d’assurance ou de l’expertise de l’assurance ainsi que la copie de l’ensemble des devis acceptés ou des factures relatives aux dommages matériels et se rapportant exclusivement au gros œuvre.
La demande doit être formulée dans les 6 mois à compter de la date du fait générateur c’est-à-dire la date de déclaration de sinistre auprès de la compagnie d’assurances ou la date du constat de l'expert ou encore la date de parution de l’arrêté ministériel déclarant la commune « zone sinistrée par une catastrophe naturelle » au Journal Officiel.
[ 1 ] Depuis le 1er octobre 2020, le PERCO ne peut plus être mis en place dans les entreprises. L'entreprise peut faire le choix de transformer le PERCO proposé à ses salariés en PER Collectif. Les PERCO existants avant l'entrée en vigueur de la loi Pacte sont toutefois maintenus et leurs bénéficiaires peuvent continuer à y effectuer des versements.
[ 2 ] Article R3334-4 du Code du travail
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Responsable de la publication : Le Directeur de la Direction de la communication de l'AMF. Contact : Direction de la communication, Autorité des marchés financiers - 17, place de la Bourse - 75082 Paris Cedex 02